Le sport avec le foulard est interdit en France

Une fille avec un foulard sur la tête pendant un entraînement de basket-ball. (IMAGO / Wolter / IMAGO / Jörn Wolter / wolterfoto.de)

La France est la seule démocratie dans laquelle plusieurs associations sportives interdisent le port de vêtements religieux lors des compétitions. Cette interdiction touche principalement les jeunes filles et les femmes musulmanes qui ne veulent pas retirer leur hijab même lorsqu'elles font du sport. Il s'agit d'une règle qui s'inscrit dans la continuité des lois et règlements des 20 dernières années : en France, les autorités, les écoles et les employeurs privés peuvent interdire le port du foulard, généralement en invoquant la « laïcité », la séparation de l'État et de la religion.

Mais cette justification est en contradiction avec les normes des droits humains, affirme Katharina Masoud, d'Amnesty International en Allemagne : « Selon le Comité des droits de l'homme des Nations unies, aucune idéologie officielle d'un État, pas même l'attitude laïque, ne constitue une raison légitime pour restreindre la liberté de religion et la liberté d'expression par une interdiction générale. Ni l'obligation générale de porter le foulard ni l'interdiction générale du foulard ne sont compatibles avec les droits humains. »

Conséquences pour la participation et la santé

Dans un rapport récent, Amnesty International recense des exemples de sports de compétition et de loisirs. Ainsi, des footballeuses, des basketteuses et des volleyeuses ont été plusieurs fois priées de retirer leur foulard avant un match, faute de quoi elles ne pourraient pas jouer.

Une telle expérience peut avoir des conséquences traumatisantes, explique Katharina Masoud, bien au-delà de la compétition : « Et beaucoup sont empêchées de faire du sport, de mettre en œuvre des mesures de promotion de la santé, et ne peuvent donc pas atteindre un niveau de performance élevé. De plus, cela a également un effet rayonnant sur les jeunes filles et les femmes qui portent ou veulent porter un foulard. Elles ne peuvent même pas voir de modèles qui réussissent dans le sport avec un foulard. »

Les associations refusent le débat

Cette interdiction des tenues religieuses est en contradiction avec les règles des associations sportives internationales. La FIFA a levé l'interdiction du foulard en 2014, la FIBA ​​en 2017. Le fait que la France suive sa propre voie est probablement aussi lié aux débats politiques des dernières décennies. Le parti d'extrême droite Rassemblement national en particulier s'attaque au foulard comme un prétendu symbole de migration, d'identité et de sécurité.

Mais c'est du racisme anti-musulman, estime la sociologue française Haïfa Tlili : « Ils manipulent la laïcité à leurs propres fins et veulent rendre invisibles les signes de la religion. Or la laïcité permet de se développer comme on le souhaite, même avec un hijab. Les associations sportives françaises excluent arbitrairement les jeunes sportives. Ces associations refusent tout débat constructif. Il faut donc chercher des soutiens en dehors de la France. »

Personne ne devrait déranger la fête

Haifa Tlili étudie depuis des années les questions religieuses dans le sport. Elle aide également les footballeuses et les basketteuses françaises à nouer des liens avec des organisations de défense des droits de l’homme. Ensemble, elles participent à des campagnes sur les réseaux sociaux ou rédigent des lettres ouvertes de protestation. A l’approche des Jeux olympiques de Paris, elles reçoivent un nombre particulièrement important de demandes de renseignements, notamment de l’étranger.

Haifa Tlili raconte : « Dans le cadre d'une initiative, 70 dirigeants de clubs français ont signé une lettre contre l'interdiction. Cette information n'était pas encore publique, mais elle a apparemment fuité jusqu'aux associations sportives. Les clubs ont alors été mis sous pression. S'ils continuaient à s'engager dans cette voie, leur financement pourrait être coupé. En France, personne n'est censé gâcher la fête avant les Jeux olympiques. »

Le CIO se réfère à la législation

En réponse à une demande écrite de la radio Deutschlandfunk, le comité d'organisation des Jeux olympiques de Paris a saisi le Comité international olympique (CIO). Le CIO a clairement indiqué dans un communiqué que la pratique du sport était un droit humain. Les athlètes sont désormais libres de porter le hijab au village olympique ou sur les sites sportifs.

Les règles techniques des associations sportives internationales s'appliquent aux compétitions elles-mêmes. Le CIO ne veut cependant pas condamner le fait que les règles de certaines associations françaises soient en contradiction avec celles de leurs associations mondiales. Dans sa déclaration, il fait également référence à la législation française et fait référence à une décision de la plus haute juridiction administrative de Paris : « L'année dernière, elle a rejeté le recours d'un groupe d'athlètes féminines et a déclaré que l'interdiction du port du hijab par la Fédération française de football, qui s'applique également au sport populaire, était 'appropriée et proportionnée'. »

Règles exactes aux Pays-Bas et au Danemark

Les organisations de défense des droits de l'homme comme Amnesty International estiment que ces déclarations ne sont pas suffisantes. Elles demandent au CIO d'exercer son influence sur le sport français. Et elles suggèrent des alternatives : dans d'autres pays, les associations sportives n'abordent pas spécifiquement le port du foulard dans leurs règlements. D'autres, comme la Fédération néerlandaise de football ou la Fédération danoise de basket-ball, ont défini exactement comment le foulard doit être porté. Cela pour éviter les blessures au cou, comme on le craint souvent.

En Allemagne, par exemple, l'avocate Asmaa El Idrissi est en contact avec la DFB et la DOSB : « Il faut prendre au sérieux le droit à l'autodétermination. Si une femme dit : « Je fais cela par conviction », ou même « je le fais, comme dans de nombreux cas, dans une perspective féministe et religieuse », il faut prendre cela au sérieux. Mais je pense que nous avons aussi besoin de beaucoup plus de personnes issues de groupes marginalisés aux postes de décision. »

En Allemagne, l'approche est différente de celle de la France. Le projet « Moving Future » de la Confédération allemande des sports olympiques, par exemple, prône une plus grande diversité au sein des instances dirigeantes. Ici, le port du hijab par les femmes est considéré comme un atout. Cela vaut également pour les compétitions.

Nihel Beranger

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