La France perd de plus en plus d’influence en Afrique

Statut : 09/04/2023 15h34

La France perd de plus en plus d’influence au Maghreb et au Sahel. De nombreux pays africains accusent l’ancien occupant de néocolonialisme. D’où vient cette nouvelle attitude anti-française ?

Depuis Par Jean-Marie Magro, ARD Studio Rabat

Les quotidiens français « Le Monde » et « Libération » ont qualifié d’inacceptable et d’arbitraire la décision de la junte militaire au Burkina Faso d’expulser ses correspondantes féminines du pays. Le gouvernement de Ouagadougou restreint ainsi une nouvelle fois la liberté des médias français. Il y a quelques mois, elle a éteint la chaîne Radio France Internationale et la semaine dernière la chaîne de télévision France 24.

Il est utile de voir le processus comme faisant partie d’un développement plus large. Une évolution que l’on pourrait appeler la chute de la France en Afrique.

Des mercenaires wagnériens à la place des troupes françaises

Depuis 2018, des militaires français sont stationnés au Burkina Faso dans le cadre de la mission Barkhane pour chasser les terroristes islamistes. Mais les djihadistes contrôlent toujours environ 40 % du pays. L’incompréhension et l’indignation dans le pays sont grandes.

Le gouvernement du Burkina Faso nie toujours qu’il travaille maintenant avec des mercenaires des troupes russes de Wagner au lieu de la France, mais de nombreuses personnes au Burkina Faso supposent qu’ils combattent déjà sur leur sol. Au Mali, ils le font officiellement, mandatés par le gouvernement militaire de Bamako.

Retrait du Sahel

La France a maintenant retiré ses soldats du Burkina Faso et du Mali. C’est vrai, dit l’étudiante malienne Fatome Boussanga, représentant de nombreuses personnes au Sahel : « Les mercenaires wagnériens sont là pour nos intérêts communs et notre développement à long terme. Les Français, en revanche, veulent juste nous faire croire que nous avons des intérêts communs ». . En vérité, mais ils ne se soucient que de leurs propres intérêts. »

Dans la lutte contre le terrorisme islamiste, beaucoup acceptent tous les moyens. Ou comme le dit l’analyste politique Mohamed Ibrahim Yattara : « Je suis un pragmatique. Peu m’importe qu’un chat soit noir ou blanc. L’essentiel est qu’il attrape des souris. Donc si on trouve des partenaires, peu importe quel pays, nous combattrons le terrorisme pour le combattre, puis amenez-le ! »

La France a maintenant retiré ses soldats du Burkina Faso et du Mali. Au lieu de cela, les mercenaires russes Wagner seraient actifs dans les deux pays.

La Russie attise le ressentiment

Un développement est en cours qui inquiète beaucoup à Paris. Ainsi que l’ex-ministre français des Affaires étrangères Dominique de Villepin. Dans une interview accordée à la chaîne de télévision France Inter, il a déclaré : « L’Afrique se rebelle contre nous. Beaucoup demandent que la France quitte l’Afrique. Il est faux de penser que ces pays sont neutres. Ils sont un levier de la politique mondiale que la Russie utilise actuellement. servi. »

De Villepin pense que l’Occident rend les choses beaucoup trop faciles pour la Russie et la Chine. Ils s’attaquent à des projets d’infrastructure et alimentent la machine de propagande anti-occidentale. Selon de Villepin, la France et le reste de l’Occident devraient en fait se rendre dans toutes les capitales d’Afrique, les convaincre et y expliquer leurs propres politiques.

Au Burkina Faso, des manifestants ont attaqué l’ambassade de France.
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Critique de l’ex-puissance coloniale

Mais beaucoup dans les anciennes colonies ne veulent plus rien avoir à faire avec les Français. Le politologue marocain Rachid Touhtou déclare : « La France a échoué depuis l’indépendance dans les années 1960. Regardez toutes les ex-colonies françaises. Elles sont sous-développées. Prenez leurs systèmes éducatifs. Ils sont les pires du monde. La France devrait avoir honte. »

Au lieu d’agir simplement dans son propre intérêt et d’exploiter les ressources de l’Afrique, Touhtou a déclaré que la France devrait repenser sa stratégie africaine – « ou la laisser à la Chine, aux États-Unis et à la Russie afin que plus de prospérité soit créée ».

Une grande partie de la critique est juste : par rapport aux anciennes colonies britanniques, les pays anciennement occupés par la France sont souvent moins bien lotis sur le plan économique et éducatif. Néanmoins, Jacob Ross, du Conseil allemand des relations étrangères, estime que Paris ne peut être tenu pour responsable de toute la misère de ces pays : « Quiconque argumente ainsi se rend la tâche beaucoup trop facile et, surtout, pour les régimes et les gouvernements là-bas. . »

« Les pays du Maghreb s’éloignent de la France »

Il y a eu un gros différend entre la France et le Maroc l’année dernière. La France avait annoncé qu’elle ne délivrerait que la moitié du nombre de visas aux citoyens du Royaume car elle refuse de reprendre les citoyens expulsés. Ce différend n’est toujours pas résolu. Pour Touhtouh, cependant, ce n’est que la pointe de l’iceberg.

Le Maroc et les autres pays du Maghreb s’éloignent de plus en plus de la France, observe le politologue : « Les investissements de la France au Maroc vont diminuer dans les cinq à dix prochaines années. On le voit déjà avec le train à grande vitesse Al Boraq, qui est basé sur le TGV, que le Maroc essaie de se débarrasser des investisseurs français. »

Le ministre russe des Affaires étrangères Lavrov voyage à travers l’Afrique pour une tournée publicitaire de la position de Moscou sur le conflit ukrainien.
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La présence française dans l’intérêt européen

Ross est plus doux dans son jugement. Tôt ou tard, les États africains devraient également se rendre compte que la Russie et la Chine agissaient de manière très égoïste et que les États-Unis n’étaient pas prêts à combler le vide laissé par la France. Néanmoins, le président français Emmanuel Macron n’a jusqu’à présent pas réussi à donner de nouvelles bases à la politique africaine de la France.

La France garder un pied sur le continent n’est pas seulement dans l’intérêt de la France, mais aussi dans celui de l’Europe. Aussi tendues que soient les relations, aucun autre pays européen d’Afrique n’est aussi profondément enraciné que la France.

Nihel Béranger

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