La résistance sur Tim de Vincent Bolloré, l’ennemi juré de Macron

Si en Italie Vincent Bolloré qualifie « d’insuffisante » l’offre de Kkr pour Tim et se dit prêt à collaborer avec le gouvernement pour le bien de l’entreprise, en France le magnat breton est en guerre avec le président Emmanuel Macron. Dans la perspective de la course de l’Elysée à la présidentielle de l’an prochain, le chef de l’Etat marque le premier actionnaire de Vivendi, qui est désormais devenu un obstacle dangereux à sa réélection. Ce qui fait peur, c’est l’empire médiatique de Bolloré, qui ne cesse de s’étendre. Un pôle qui comprend les journaux, la radio et la télévision, de plus en plus orientés vers une ligne d’ultra-droite qui inquiète l’Elysée, mais aussi le monde de l’information. Dans ce match, Bolloré s’appuie sur le journaliste et commentateur ultraconservateur Eric Zemmour : « le bélier » qui mine le paysage politique au-delà des Alpes.

Le Monde a récemment révélé dans une enquête que Bolloré et Macron se retrouveraient en juin à l’Elysée pour un déjeuner. Sous les stucs dorés du palais présidentiel, l’ambiance était « glaciale » tout du long. « Eh bien, arrête, tu achètes tout ! », aurait dit le locataire du palais présidentiel à son invité. La référence était aux nombreuses acquisitions réalisées ces derniers temps, notamment dans le secteur des médias. Vivendi est récemment devenu actionnaire majoritaire de Lagardère, qui détient la radio Europe1, les hebdomadaires Paris Match et Le Journal du Dimanche et la maison d’édition Hachette. Selon Mediapart, l’homme d’affaires aurait même visé Le Figaro. Une information démentie par la famille Dassault, propriétaire du journal français conservateur, même si aucun commentaire n’est parvenu de l’entourage de Bolloré.

L’arrivée du magnat effraie les éditeurs français qui craignent la « cure Bolloré ». Ils le savent bien à Europe 1 où les craintes de « synergies » avec la chaîne ultra-conservatrice CNews, surnommée la « French Fox news » pour sa ligne similaire au diffuseur cher à Donald Trump, ont poussé une soixantaine de salariés à démissionner en raison des craintes. un virage radical à droite. A leur place, des journalistes et collaborateurs fidèles au magnat. Un scénario déjà vu dans le passé. Bolloré arrive, impose ses visages familiers et repousse ceux qui tentent de s’opposer à lui. Une technique reconnue par Bolloré lui-même lors d’une réunion du comité d’entrepriseet Canal +, lorsqu’il a déclaré que la direction d’un grand groupe « mérite un peu de terreur ».

Des tons différents par rapport à ceux utilisés ces dernières heures en Italie, après l’annonce d’un intérêt du fonds américain Kkr pour l’acquisition de Tim, dont Vivendi est l’actionnaire majoritaire avec environ 23,5% du capital. . Par l’intermédiaire d’un porte-parole, le groupe français et confirmé d’être « un investisseur de long terme » et a confirmé « la volonté d’œuvrer aux côtés des autorités italiennes et des institutions publiques pour une réussite à long terme ». Vivendi a alors démenti « J’ai fermement discuté avec n’importe quel fonds, et plus particulièrement avec CVC » pour une éventuelle offre publique d’achat sur Tim pour s’opposer à l’offre de Kkr.

En France, Bolloré se sent menacé par la plus haute autorité de l’Etat. Quelques mois avant la rencontre avec Macron, le tribunal de Paris avait décidé de mettre en examen l’homme d’affaires pour une affaire de corruption au Togo, malgré le fait que l’intéressé avait plaidé coupable et prêt à payer 12 millions d’euros. C’en est trop pour Bolloré, qui selon Le Monde est désormais convaincu de l’hostilité de Macron à son égard. L’ancien président Nicolas Sarkozy, également cité dans l’enquête, affirme que son successeur aurait demandé à la chancelière Angela Merkel d’intervenir pour éviter la vente de la chaîne M6, détenue par l’Allemand Bertelsmann, à Vivendi (qui s’est ensuite retrouvée dans le concurrent Tf1 , propriété du français Bouygues). Macron aurait également demandé au président de LVMH Bernard Arnault, l’un des dix hommes les plus riches du monde selon Business Insider, de rejoindre Lagardère pour contenir l’avance du concurrent.

Ouvrez la guerre maintenant. Et comme dans tous les conflits, chacun déploie ses meilleures armes. Celui de Bolloré s’appelle Eric Zemmour, un journaliste et chroniqueur bien connu qui a été plusieurs fois condamné pour ses sorties contre l’islam et les immigrés. Beaucoup d’entre eux, ont parlé aux micros de CNews, une chaîne du Groupe Bolloré. Grâce aux interventions du journaliste controversé, la chaîne a les notes ont triplé, devenant en septembre le journal télévisé le plus suivi en France, devant BfmTv

Zemmour, qui n’est pas encore candidat officiellement, s’est lancé en septembre dans un sondage qui l’a conduit à dépasser Marine Le Pen. Un tremblement de terre dans le paysage politique français, malgré le fait qu’il se redresse depuis quelques jours (selon le dernier sondage OpinionWay il serait tombé brutalement à 13% derrière les 24-25% de Macron, 19-21% et 13% de Le Pen le républicain Xavier Bertrand si ce dernier remporte la candidature de son parti en décembre). Zemmour et Bolloré se parlaient au téléphone tous les jours et se voyaient une fois par mois pour le déjeuner, selon Le Monde.

Une entente solide, qui déçoit les attentes de Marine Le Pen, séduite et abandonnée par un entrepreneur jusqu’à récemment considéré comme un allié fidèle.

Nihel Beranger

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