Madeleine de Scudéry : Liberté, Egalité, Fraternité

Comme beaucoup de contemporains, elle avait un alter ego dans les romans. Sapho, la poétesse la plus célèbre de l’Antiquité, a formulé des exigences qui sonnent encore aujourd’hui. À l’époque, cependant, ils étaient de la dynamite. A une époque où l’éducation féminine était uniquement tournée vers le mariage, ses personnages prônent le libre choix du conjoint. Lorsque Louis XIV (1638-1715) renvoya son ministre des Finances, Nicolas Fouquet, et le mit en prison, il y eut une grêle de critiques acerbes dans la communauté du divertissement fictif. Lorsqu’il renverse l’édit de Nantes et fait à nouveau persécuter les huguenots, les héros de Scudéry réclament la liberté de religion. Tous les sujets sensibles se retrouvent dans ses écrits : l’injustice entre les sexes et les classes sociales, traitant de l’éducation, de la politique, de l’absolutisme, de l’arbitraire, des guerres culturelles. Tout cela se retrouve sans danger dans le roman, sur un ton verbal désinvolte. De l’oralité des salons, Sappho ne voulait rien moins que développer la maturité et la liberté des femmes.

La liberté de la femme de choisir son mari

La liberté était le plus grand thème de Scudéry. Avant tout, la liberté de choisir comment et avec qui une femme veut passer sa vie. Madeleine de Scudéry ne s’est jamais mariée. Dans les romans, elle donne tant de raisons contre le mariage que ce n’est pas surprenant. Les filles vivent d’abord sous la coupe de leur père, plus tard sous la coupe de leur mari. Ils n’ont pas grand-chose à décider. Dans le mariage, une femme n’est rien d’autre que « la première esclave de la maison ». Chaque soldat vit une vie plus libre qu’eux, dit une princesse dans l’œuvre de Scudéry « Clélie ». Même dans le cas rare d’un mariage d’amour, les héroïnes des livres de Scudéry restent sceptiques : « L’amour peut survivre à la mort, mais jamais le mariage.

Dans le mariage, une femme n’est rien d’autre que « la première esclave de la maison »

La beauté est aussi une chose : quand un homme tombe amoureux des charmes d’une femme, cela devient difficile au plus tard quand, après la naissance de plusieurs enfants et la perte de plusieurs dents, il ne reste plus grand-chose de la beauté. Puis le bonheur conjugal a pris fin. Il s’amuse ailleurs et elle reste assise et ne sait même pas lire. Il y a un dilemme à propos de cette construction. Les rapports entre hommes et femmes fonctionnent beaucoup mieux dans une amitié égalitaire. Une relation jugée très improbable à l’époque.

Ensemble, égaux, amicaux. C’était là, aux yeux de Sappho, l’idéal de la relation humaine. Elle-même était une amie proche de Paul Pellisson, un poète de 16 ans son cadet et avec qui elle était proche depuis des décennies. Lorsque Pellisson est arrêtée lors de l’affaire Fouquet en 1661, elle se bat pour son amie devant le roi jusqu’à ce que Pellisson soit libéré de prison. L’amitié est bien plus que n’importe quel mariage arrangé, ne serait-ce que parce que les deux parties doivent constamment lutter l’une pour l’autre.

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« Carte de Tendre » | La carte du pays imaginaire de Tendre apparaît dans le roman de Scudéry « Clélie ». C’est une carte allégorique qui trace le chemin des relations humaines.

Scudéry a érigé un monument à l’amitié dans son roman « Clélie ». Il contient la »Carte de Tendre«, une carte allégorique. Elle montre aux amis le chemin et les dangers qui les guettent. Des fleuves y sont répertoriés, des mers, des montagnes, des « Terres Inconnues ». La carte était célébrée dans les salons comme un signe de la relation idéale. Les visiteurs ont utilisé les métaphores et avaient non seulement un plan de match à portée de main, mais aussi le vocabulaire pour parler de relations interpersonnelles qui fonctionnaient différemment que d’habitude. La prison du mariage était un lieu relativement simple. Dans la liberté de l’amitié, le couple humain a dû se réorienter.

Les femmes qui ont défié la supériorité de l’homme

Quiconque secoue les barreaux de la société se fait des ennemis. Et Madeleine de Scudéry et ses amis en avaient plein. Les gouvernants de la morale, de l’ordre social et des règles de la poésie se sentaient menacés par des femmes qui remettaient en cause ce qui était le plus acquis : la supériorité des hommes dans le mariage et la supériorité de l’académie sur le salon. Des opposants comme l’auteur Nicolas Boileau (1636-1711) défendent obstinément et avec persistance le canon contre la littérature de Salon.

Nihel Béranger

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