Il se voulait le symbole d’un partenariat étroit : en milieu de semaine, les ministres des gouvernements de Paris et de Berlin devaient en effet se rencontrer au château de Fontainebleau, célèbre pour son art de la Renaissance. Les réunions conjointes du cabinet ont une longue tradition et visent à montrer à quel point les deux pays travaillent en étroite collaboration. En raison de trop de questions controversées et prétendument aussi en raison de problèmes d’horaire, la réunion a récemment été reportée – à l’année prochaine.
Afin de maintenir un dernier semblant d’unité, le chancelier Olaf Scholz s’est rendu mercredi à Paris pour un « déjeuner de travail » avec le président Emmanuel Macron. Cela a duré trois heures, puis les deux hommes se sont rencontrés en privé. La rencontre a été « très intense, très coopérative », a déclaré la partie allemande. Il y avait un « grand accord ». La politique énergétique et la défense ont été discutées en détail, et la préoccupation commune concernant le protectionnisme aux États-Unis était également un problème, a-t-il déclaré.
Cependant, il n’y a probablement pas eu une renaissance complète des relations franco-allemandes fortement tendues. Il était donc significatif qu’à part une séance photo, il n’y ait eu ni conférence de presse ni déclarations conjointes de la chancelière et du président. Il a été souligné qu’il n’y avait pas eu d’apparition conjointe lors d’un dîner de Scholz et Macron le 3 octobre à Berlin. Néanmoins, la partie allemande aurait bien accueilli une telle nomination à Paris ; les deux hommes auraient pu faire preuve d’unité fondamentale. Au lieu de cela, il y a, au moins publiquement, un mutisme dans les relations franco-allemandes. Et en toile de fond, mercredi, il y a même eu un regain de ressentiment côté français car le gouvernement fédéral avait initialement annoncé une conférence de presse entre Scholz et Macron sans en discuter avec les Français.
Après tout, il devrait y avoir des progrès sur l’une des questions litigieuses : les deux parties ont apparemment éliminé certains obstacles dans le projet d’armement conjoint du Future Combat Air System (FCAS). Il s’agit d’un système moderne de combat dans les airs, dans lequel des avions, des drones et de nouveaux systèmes d’armes sont coordonnés les uns avec les autres. Le projet, dans lequel l’Espagne est également impliquée en plus de l’Allemagne et de la France, a à peine démarré ces derniers temps. Le projet avait également tendu les relations entre les deux pays pour une autre raison: il y avait du ressentiment à Paris que Scholz n’ait pas mentionné un mot sur le système FCAS dans son discours européen à Prague en août. Il est politiquement et industriellement important pour la France.
Récemment, les tensions croissantes entre Berlin et Paris étaient passées au premier plan. En marge du dernier sommet de l’UE à Bruxelles, Macron a accusé le gouvernement allemand de « s’isoler » en Europe. Le porte-parole du gouvernement allemand, Steffen Hebestreit, a déclaré à propos de l’annulation du Conseil des ministres conjoint franco-allemand qu’il y avait des divergences sur « toute une gamme de questions différentes ».
« Le Monde » se demande si Macron manque le partenaire convoité
L’inquiétude suscitée par la relation tendue grandit également en public. Le journal Le Monde a exigé mercredi qu’il y ait un redémarrage d’urgence. « Les différences visibles entre la France et l’Allemagne surviennent au pire moment possible, alors que Vladimir Poutine teste la solidarité européenne et que le leadership franco-allemand dans l’alliance des 27 nations est remis en question. » De toute évidence, Macron n’a pas encore trouvé en Scholz le « partenaire convoité » qu’il avait autrefois en la chancelière Angela Merkel. Macron et Merkel étaient considérés comme des confidents.
Macron et Scholz semblent moins confiants : Paris a réagi avec colère que Scholz n’ait pas informé à l’avance le Palais de l’Élysée de son projet d’aide de 200 milliards. Lorsque Macron a déclaré à Bruxelles qu’il n’était pas bon que l’Allemagne s’isole, il a également fait allusion au mécontentement des autres gouvernements. Le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki a parlé de « l’égoïsme allemand ». Le ressentiment était dû au fait que l’Allemagne voulait développer un plafond du prix du gaz pour ses propres consommateurs, mais l’a rejeté au niveau de l’UE. Scholz, à son tour, a rejeté les allégations. « Nous avançons (…) dans le cadre de ce que font les autres en Europe », a-t-il dit.
En tout cas, après la rencontre avec Macron à Paris, Scholz a tenté de donner l’impression que la relation avec le chef de l’Etat français était intacte. « C’était une très bonne et importante conversation aujourd’hui », a-t-il écrit sur Twitter. « L’Allemagne et la France sont proches et relèvent les défis ensemble. »
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