L’expression française « emmerder » peut être traduite de diverses manières, dans sa version indirecte elle reste un « dérangeant », « ennuyeux » inoffensif. Employée directement – contre quelqu’un d’une manière spécifique – l’expression prend des allures de « va en enfer ». Ou pire, semblable au vaffa de memory grillina.
Le président français Emmanuel Macron a choisi l’option la plus douce – dans une interview publiée par le journal Le Parisien – pour rappeler aux Français non vaccinés que le chef de l’Etat fera tout pour leur faire prendre conscience qu’ils sont du mauvais côté de l’histoire. La réaction du président n’a pas été bien accueillie pour beaucoup. Tout d’abord les députés du Parlement français qui discutaient du projet de loi pour la passer le vaccin, l’homonyme du super pass vert italien, c’est-à-dire un certificat d’achèvement du cycle de vaccination à présenter pour accéder aux lieux publics. « Un président ne peut pas soutenir ces intentions. Je ne peux pas justifier un texte qui veut « casser les cartons » aux Français », a déclaré Christian Jacob, président des Républicains.
La discussion a été suspendue et la reprise du débat sera plus compliquée au vu des tensions politiques, conséquence de la déclaration de Macron. Les oppositions s’étaient déjà déclarées réticentes à l’idée de limiter les libertés individuelles au profit de la vaccination et du droit à la santé. La liberté est la meilleure des protections. La liberté est la meilleure incitation à l’intelligence collective », a déclaré à l’assemblée Jean-Luc Mélenchon, chef de file du parti de gauche La France Insoumise.
Même la presse n’a pas été clémente avec le président : « Macron populiste : vulgaire, védicatif… au lieu d’être le président du syndicat, Emmanuel Macron s’est présenté lundi comme le candidat de la faille », titre aujourd’hui la Une de Libération . Fracture, division, clivage est le mot également utilisé par Le Monde, pour décrire le choix de vaccination de Macron. Plus serein Le Figaro qui choisit « La stratégie de l’affrontement » pour décrire les intentions du président. 60 % des 278 000 votants du sondage « Déranger les Français : êtes-vous bluffé par la déclaration du président Macron ? il a répondu oui.
Avec les déclarations de Macron, quelque chose a changé, mais était-ce émotivité ou calcul politique froid ? Pauline Théveniaud fait partie des journalistes du Parisien qui ont assisté en direct à la déclaration de Macron. L’entretien en question était une séance de questions-réponses entre Macron et quelques citoyens sélectionnés par le journal parisien, invités à l’Elysée pour l’occasion. La vaccination était au centre du débat, mais elle a touché Macron après une déclaration d’une infirmière – qui a déclaré au président que 85% des patients en soins intensifs ne sont pas vaccinés et mettent en danger le fonctionnement de l’hôpital. A ce moment la sentence est prononcée « Je veux vraiment faire chier les non vaccinés ». On croirait à une vague d’émotion, mais Macron continue.
« Les non vaccinés sont des irresponsables et les irresponsables ne sont pas des citoyens », une phrase en apparence anodine, qui évoque en France le spectre de privation de nationalité, une question soulevée par la droite dans les moments les plus sombres du terrorisme islamiste. Priver une personne de sa citoyenneté pour toujours, la rendre de facto apatride, est un concept qui ne s’applique pas en droit. L’évoquer peut cependant scandaliser les juristes, les citoyens et la presse. Mediapart consacre un article et un post Instagram à ce sujet : « Sur les non vaccinés, Emmanuel Macron invente la déchéance de citoyenneté ». Selon le site d’enquête, le président de la République, garant de l’État de droit, « commet une faute morale, institutionnelle et politique. Il rend le débat hystérique, divise la société et souffle sur ce qu’elle doit combattre ». Il s’agirait d’un acte politique spécifique, qui selon Libération, en revanche, le met au niveau de la polémique prônée par Eric Zemmour.
L’un des derniers sondages sur les intentions de vote présidentiel des 10 et 24 avril 2022 – commandé par Le Figaro et LCI – voit Emmanuela Macron en tête avec 27% des voix. Détachées Marine Le Pen (Rassemblement national) et Valérie Pécresse (Les républicains), toutes deux s’arrêteraient à 16%. Le président « mal au cou » est en net avantage, confiant du semestre de présidence européenne et du résultat obtenu avec les vaccinations : 91% des adultes français sont totalement vaccinés. Se concentrer sur les cinq millions de non vaccinés pour ouvrir la campagne électorale peut s’avérer risqué.
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