Pour tout le monde, il est « le président ». Depuis sa maison de la côte normande où il s’est retiré quelques années, maintenant octogénaire et en mauvaise santé, il n’y a pas un moment où l’on ne pense pas à la politique et à la possibilité de sa relance. Et un nouvel appel de Paris. Il remonte à l’hémicycle du parlement où il s’est exprimé des milliers de fois, aux nombreux ministères qu’il a dirigés. A l’Hôtel de Matignon, siège du Premier ministre français. Un poste qu’il a occupé avec beaucoup de prestige. En bref, Émile Beaufort était l’un des puissants de la Troisième République. Il ne manquait que l’Elysée, la présidence de la République : un tourment qui ne s’est jamais calmé. Cela peut sembler être l’actualité politique de ces derniers temps, mais c’est plutôt un bon film sorti il y a 60 ans avec l’acteur français par excellence, Jean Gabin. L’histoire est une invention née quelques années plus tôt sous la plume de Georges Simenon, en pause entre un Maigret et un autre (en Italie c’était Posté par Adelphi). Avec une intrigue qui se déroule dans un subtil équilibre entre introspection psychologique et intrigue politique.
L’écrivain belge, ancien journaliste et homme du monde, s’est inspiré de la figure de George Clemenceau, premier ministre français historique sorti vainqueur de la Grande Guerre mais vaincu dans la course à la présidence de la République en 1920. Avec pour conséquence choix de se retirer dans la vie privée. Dans le film, réalisé avec un certain savoir-faire par Henri Verneuil, surtout connu pour le polar Le clan des siciliens, Gabin est en pleine forme. Tant lorsqu’elle mène sa nouvelle vie en robe de chambre, dans l’enceinte de sa maison, que lorsqu’elle repense aux années dorées de Paris. Tant quand, en flashbacks, il évolue à son aise dans les palais du pouvoir. Tous les jours Émile Beaufort, « le président », rencontre son médecin, chauffeur et secrétaire. En marge de certains livres, il garde des notes sur sa vie passée ainsi que quelques documents brûlants qui pourraient donner plus de fil à retordre aux politiciens encore en activité. L’ébranler en pleine crise gouvernementale, c’est la nouvelle, lue dans les journaux et entendue à la radio, de la possible candidature au poste de Premier ministre de son ancien collaborateur qui a ensuite fait carrière. Le président devient morose car il garde une lettre qui mettrait fin en un clin d’œil à l’aventure politique de l’ancien galop, empêtré dans une affaire immonde. Alors que lui, au contraire, est réputé pour sa haute moralité dans la gestion du pouvoir. Ainsi commence le tourment intérieur du président quant à la décision à prendre. Le film, comme le roman, est très intense et caractérisé par un grand rythme. Les interprétations, Gabin avant tout, sont justes. Président il est définitivement recommandé pour les amateurs du genre. ET Château de cartes et certains événements qui se sont alors produits en réalité étaient encore loin d’être parcourus.
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