Tyran ou héros ? La commémoration du bicentenaire de la mort de Napoléon Bonaparte critiquée en France – 05/05/2021

Le président français Emmanuel Macron a célébré ce mercredi (5) par un discours et une cérémonie le 200e anniversaire de la mort de Napoléon Bonaparte. Le personnage est indissociable de l’histoire de France, mais son héritage est controversé et de nombreuses personnes critiquent l’hommage officiel, estimant qu’il est « impossible » de rappeler en 2021 la mémoire du premier empereur français, qui a rétabli l’esclavage en 1802.

Le président français Emmanuel Macron a célébré ce mercredi (5) par un discours et une cérémonie le 200e anniversaire de la mort de Napoléon Bonaparte. Le personnage est indissociable de l’histoire de France, mais son héritage est controversé et de nombreuses personnes critiquent l’hommage officiel, estimant qu’il est « impossible » de rappeler en 2021 la mémoire du premier empereur français, qui a rétabli l’esclavage en 1802.

Napoléon Bonaparte est une figure de transition entre l’Ancien Régime et une nouvelle ère libérale. Il accède au pouvoir en 1799, au lendemain de la Révolution française, et en 1804 il se proclame empereur. Napoléon a gouverné la France pendant 15 ans et a initié d’importantes réformes dans le pays, comme le Code civil, la Cour des comptes, les Lycées… Il déclare la guerre aux monarchies de l’époque et conquiert presque toute l’Europe.

Arrêté par les Britanniques en 1815 après sa défaite à la bataille de Waterloo, il meurt en exil le 5 mai 1821, à l’âge de 51 ans, sur l’île de Sainte-Hélène. Sa dépouille fut rapatriée en 1840, par décision du roi Luís Filipe, et placée au monument des Invalides, à Paris.

Mais l’héritage de Napoléon divise encore les Français, qui se demandent si le personnage historique doit être considéré comme un héros ou un tyran. Et la décision d’Emmanuel Macron de commémorer le bicentenaire de sa mort ravive la polémique.

Plusieurs hommes politiques de l’opposition, qui dénoncent « la tendance bonapartiste » de l’actuel président français, voient dans l’hommage une politisation de l’histoire. Le député centriste Jean-Christophe Lagarde a déclaré à RFI que « la politique ne se mêle pas à l’histoire, surtout quand il s’agit de Napoléon Bonaparte ». Alexis Corbière, du parti de gauche radicale França Insubmissa, a déclaré que « fêter Napoléon dans le contexte actuel, c’est nourrir cette figure qui hante la vie politique ».

Restauration de l’esclavage

En plus de la réputation d’être autoritaire et misogyne, l’un des héritages les plus controversés de Napoléon est le rétablissement de l’esclavage dans les colonies du pays. La pratique avait été abolie en 1794, après la Révolution française, et la libération définitive des esclaves avait été décrétée en France en 1848.

« On ne peut pas célébrer des choses contraires à cela. Si Emmanuel Macron insiste pour commémorer le bicentenaire de la mort de Napoléon Bonaparte, il ne sera pas digne de célébrer l’abolition de l’esclavage le 10 mai », s’indigne George Tin, président d’honneur du Conseil des représentants. des Associations du Mouvement Noir de France.

L’hommage choque particulièrement les habitants des départements français d’outre-mer, Guadeloupe, Martinique et Réunion, dont la population est en grande partie composée de descendants d’esclaves. « Aucune victime ne peut célébrer son oppresseur à moins qu’il ne soit fou ou aliéné », déclarent le Comité international des peuples noirs (FKNG) et le Mouvement international pour les réparations (MIR). Dans un communiqué, les deux mouvements associent hommage et « racisme liberticide ».

« Célébrer, c’est se souvenir collectivement, mais pas honorer », explique l’historien Frédéric Régent dans un entretien à la radio France Info. Pour lui, « grâce à cette commémoration, la plupart des Français sauront que Napoléon a rétabli l’esclavage ».

partisans

La controverse reflète les tendances politiques actuelles en France. Selon le porte-parole de la banquette du gouvernement à l’Assemblée, le député Pieyre-Alexandre Anglade, il est ridicule de voir le député de France Insoumis Alexis Corbière, qui a un chef (Jean-Luc Mélenchon) qui se considère comme un homme providentiel, dire que Macron profite du mythe napoléonien ».

Le conservateur Pierre-Henri Dumont des Républicains ne voit aucune controverse dans l’héritage de Napoléon. Pour lui, le premier empereur français mérite un hommage. « On a le Code civil, les lycées, les maires (représentants de l’Etat dans les départements et régions), les départements. On n’a pas à avoir honte de faire la fête », se défend Dumont.

Célébrer, mais de manière lucide et équilibrée, sans cacher les points négatifs de l’héritage de l’empereur français, c’est ce que propose le gouvernement. Le député Oliver Bechet du Parti Macron à la Marche rappelle que « Napoléon a une image en France et une image catastrophique dans le reste de l’Europe, où il a été jugé par divers peuples comme un oppresseur ».

Craignant que le président français brille seul à cet honneur, Marine Le Pen, leader du parti d’extrême droite Réunion nationale et principal adversaire de Macron à la présidentielle de l’an prochain, a publié un manifeste de presse proclamant « Vive l’Empereur, vive le grandeur ». Contrairement à d’autres critiques, elle a déploré que cet hommage national à Napoléon, qui « a œuvré à réorganiser la France en tant qu’unité, en tant que nation, de manière pacifique, et a tant fait pour le pays et le monde », soit si dérisoire.

Hommage aux invalides

Emmanuel Macron a prononcé un discours à la mémoire de Napoléon Bonaparte à l’Institut de France, avant de déposer une gerbe sur le monument aux Invalides. « Nous ne tenons pas une célébration exaltée, mais une commémoration exaltée », a justifié le président français. « L’œuvre complète de Napoléon, pleine de contrastes, n’a pas encore livré tous ses secrets. Elle continue de nous façonner », a déclaré Macron. Répondant aux critiques, il souligna que le rétablissement de l’esclavage en 1802 était une « erreur, une trahison de l’esprit des Lumières ».

« Bien que pour certains Napoléon ait détruit la Révolution française, pour une autre partie de l’historiographie et des études plus actuelles, ce n’est pas tout à fait le cas. Napoléon Bonaparte a consolidé le droit et le pouvoir bourgeois qui était l’idéal de la Révolution française. Ce n’était pas un idéal de démocratie . » , s’interroge l’historienne brésilienne Lucia Bastos das Naves, de l’UERJ, auteur du livre « Napoleão Bonaparte : imaginaire et politique au Portugal ».

Nihel Beranger

“Coffee addict. Lifelong alcohol fanatic. Typical travel expert. Prone to bouts of apathy. Internet pioneer.”

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *