L’État est-il responsable de la pollution de l’air ?

Un Parisien réclame 21 millions d'euros à l'État parce que celui-ci n'a pas veillé au respect des valeurs limites d'oxyde d'azote. Mais un État peut-il réellement en être responsable ? Le procureur général dit clairement : Oui.


L'État peut être tenu responsable des dommages à la santé causés par le dépassement des valeurs limites de pollution atmosphérique à l'échelle de l'UE. Les mêmes exigences du droit de l'Union s'appliquent ici comme toujours en matière de responsabilité de l'État, selon l'avocat général près la Cour de justice de l'Union européenne (CJCE) dans son avis (du 5 mai 2022, affaire C-61/21).

Un habitant de Paris réclame 21 millions d'euros de dommages et intérêts à l'État français parce que la pollution croissante de l'air dans la zone métropolitaine a porté atteinte à sa santé. La France est responsable car elle n’a pas veillé au respect des valeurs limites uniformes à l’échelle de l’UE. La CJCE a également constaté en 2019 que les valeurs limites de dioxyde d'azote avaient été dépassées dans la métropole parisienne. Paris a également enregistré l'excédent jusqu'en 2020.

La Cour administrative d'appel de Versailles en France, impliquée dans l'affaire, a fait appel devant la CJCE et, dans le cadre d'une demande de décision préjudicielle, a demandé dans quelles conditions les particuliers peuvent réclamer des dommages et intérêts à l'État pour les dommages à la santé résultant de la violation des valeurs limites de l’UE.

La procureure générale de la CJUE, Juliane Kokott, estime désormais qu'il existe certainement une possibilité de demande de dommages-intérêts contre l'État. Toutefois, trois conditions devraient être remplies pour que cela se produise, à savoir celles qui doivent toujours être remplies lorsqu'un État est responsable.

Lien de causalité entre la violation de la réglementation et les atteintes à la santé ?

Premièrement, il faudrait que la réglementation donne des droits aux individus, ce qui est le cas ici. L'objectif principal des valeurs limites fixées par les directives européennes est de protéger la santé humaine. De plus, le dépassement des valeurs limites touche particulièrement certains groupes qui vivent ou travaillent dans des zones particulièrement polluées. Quoi qu’il en soit, tout le monde ne peut pas exiger une indemnisation, mais seulement ceux qui dépendent réellement d’une protection juridique.

Deuxièmement, il doit y avoir une violation grave de la réglementation. Selon l'avocat général, c'est le cas des périodes pendant lesquelles les valeurs limites ont été dépassées sans qu'il n'y ait de plan d'amélioration de la qualité de l'air. Il appartient aux juridictions nationales de le déterminer.

Il est plus difficile de remplir la troisième condition : la preuve d'un lien de causalité direct entre la violation grave des réglementations sur la qualité de l'air et les dommages concrets à la santé. Pour que cette preuve aboutisse, la personne lésée doit avoir passé une période suffisamment longue dans un environnement dans lequel les valeurs limites ont été violées, selon le procureur général. La durée est une question médicale qui nécessite régulièrement un rapport médical. L'État membre peut toutefois s'exonérer en prouvant que les valeurs limites auraient été dépassées même s'il avait émis en temps utile des plans pour la qualité de l'air.

équipe éditoriale pdi/LTO

Suggestion de citation

Avis de la CJCE : L'État est responsable de la pollution de l'air. Dans : Legal Tribune Online, 5 mai 2022, https://www.lto.de/persistent/a_id/48354/ (consulté le : 17 février 2024)


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Nihel Beranger

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